Bilan des opérations Thunderball et Demeter V
Remarques d’ouverture d’Ivonne Higuero, Secrétaire générale de la CITES, à la réunion bilan de l’opération Thunderball
26 novembre 2019, Shenzhen, Chine
Excellence M. Ni Yuefeng, Ministre de la Douane chinoise
Excellence M. Zhuang Guotai, Vice-Ministre de l’écologie et de l’environnement
Excellence M. Li Chunliang, Vice-Administrateur de l’Administration nationale des forêts et des prairies
M. Yang Hong, membre du Comité permanent du Parti communiste chinois de Shenzhen
M. Kunio Mikuriya, Secrétaire général de l’Organisation mondiale des douanes,
Excellences, invités spéciaux, mesdames et messieurs,
Je suis infiniment reconnaissante au Gouvernement de la Chine et à l’Organisation mondiale des douanes de m’avoir invitée à cette réunion bilan des opérations THUNDERBALL et DEMETER V. C’est vraiment un honneur pour moi d’être ici et je suis très heureuse de constater les excellentes relations de coopération qui lient le Secrétariat de la CITES, le Gouvernement de la Chine et l’OMD.
Nous connaissons tous l’évaluation mondiale récente de l’IPBES qui nous met en garde contre un risque record d’extinctions. J’ai récemment conclu ma première session de la Conférence des Parties en qualité de Secrétaire générale, en me faisant l’écho de l’appel « à l’humanité à répondre à la crise de l’extinction qui s’amplifie en transformant notre manière de gérer les animaux et les plantes sauvages de ce monde » et à la constatation que « nous ne pouvons plus faire comme si de rien n’était ».
En d’autres termes, lutter contre la criminalité liée à l’environnement, y compris la criminalité qui implique le commerce illégal de spécimens sauvages de la faune et de la flore, n’a jamais été plus important. Nous devrions être encouragés par le fait que la criminalité contre les espèces sauvages est aujourd’hui reconnue à l’échelon mondial comme un crime grave.
La criminalité contre les espèces sauvages menace nos valeurs, nos structures de gouvernance et l’état de droit. Le commerce illégal des espèces sauvages s’attaque aux fondements du commerce légal et durable des produits des espèces sauvages et des forêts pour lequel la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, que la plupart d’entre vous connaissent sous le nom de CITES, a été créée, en 1973.
Le commerce légal, dans le cadre de la CITES, contribue à l’économie de nombreux pays en développement, soutient les communautés locales et leurs moyens d’existence, conserve les espèces sauvages de la faune et de la flore et, enfin, nous aide à atteindre les Objectifs de développement durable.
Les annexes de la Convention ont tendance à s’allonger, ce qui reflète la croissance à la fois de la demande et des populations humaines. Le commerce d’espèces toujours plus nombreuses doit être réglementé pour éviter la surexploitation. Tout cela illustre la valeur que ne cesse de prendre la CITES en tant que régulateur du commerce international de plantes et d’animaux sauvages ; mais cela signifie aussi que les douanes et les services de répression ont un rôle très difficile à jouer en tentant de réglementer le commerce légal de plus de 36 000 espèces. Je suis cependant convaincue qu’en travaillant ensemble, nous pourrons relever ce défi.
La CITES adopte une triple approche pour lutter contre le trafic d’espèces sauvages : réduire la demande pour les espèces sauvages illégalement acquises, démontrer les avantages d’un commerce légal bien géré et renforcer les efforts d’application des lois.
J’ai bien souvent souligné que le rôle des douanes en appui à la Convention est d’importance critique. Un agent des douanes est en général le premier, et parfois le seul, à inspecter les envois contenant des spécimens CITES. En vérifiant que ce commerce est conforme aux dispositions de la CITES, et en détectant la fraude et le commerce illégal, le cas échéant, les agents des douanes sont notre première ligne de défense.
Les criminels, souvent des criminels transnationaux, volent leurs ressources naturelles aux peuples du monde entier. Nous devons protéger aussi bien les espèces sauvages que les personnes, en travaillant en collaboration, de manière à traîner les criminels impliqués en justice.
Et pour ce faire, nous devrons travailler dans le cadre du Consortium international de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages (ICCWC). En 2010, la CITES, INTERPOL, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, la Banque mondiale et l’Organisation mondiale des douanes ont collaboré pour fournir un appui coordonné, aux niveaux national et régional, à la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages. Le Consortium continue d’apporter un soutien bien ciblé aux pays sur la manière de déployer les outils et les techniques qui servent habituellement à lutter contre d’autres crimes graves.
Les travaux de l’opération Thunderball, coordonnée par INTERPOL et l’OMC sous les auspices de l’ICCWC, illustrent ce dont nous avons besoin – une coopération, une communication et une coordination interfrontalières et internationales, car le plus souvent, c’est à une criminalité transfrontalière que nous sommes confrontés.
Tout au long de l’opération, les douanes et les services de police, soutenus par les autorités responsables de l’environnement, les organismes chargés des espèces sauvages et des forêts, les agences de garde-frontières et les organes de gestion CITES ont travaillé main dans la main. Ils ont identifié et intercepté des envois contenant des espèces sauvages protégées et réglementées par la Convention.
Votre engagement et votre exemple ont affermi l’assise et l’avenir de notre Convention qui fête ses 45 ans. Vous, les services des douanes et de la répression, avez soutenu l’application de la CITES au plan mondial en vous attaquant au commerce illégal de produits des espèces sauvages et des forêts tout au long de cette opération. Vos efforts collectifs sont la raison du succès de l’opération Thunderball.
À la 18e session de la Conférence des Parties à la CITES qui a récemment eu lieu à Genève (en août 2019), les Parties ont discuté de 57 propositions d’inscription et examiné 140 documents de travail sur une diversité de questions. Elles ont adopté 46 propositions d’amendement des annexes ainsi que 8 nouvelles résolutions, 26 résolutions révisées et 353 décisions. Parmi celles‑ci, il y avait un grand nombre de décisions visant à améliorer nos efforts collectifs de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages. Elles ont reconnu, en particulier, les excellents progrès de l’ICCWC dans son assistance aux Parties en matière de lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages, et mis l’accent sur l’utilisation des outils disponibles pour lutter contre cette criminalité et la corruption, ainsi que contre la criminalité liée aux espèces sauvages dans le contexte de l’internet. Les résolutions adoptées nous montrent la voie à suivre et il est impératif que nos efforts soient concertés pour garantir leur application.
Si nous nous tournons vers l’avenir, plusieurs questions importantes doivent retenir notre attention, dont la plupart ont été soulignées à la CoP18 :
Tout d’abord, nous ne devons pas oublier que les avantages du commerce légal, durable et traçable sont clairs. Les espèces sauvages ont le pouvoir de sortir les populations locales de la pauvreté d’une manière mutuellement bénéfique et autosuffisante.
Deuxièmement, nous devons poursuivre nos efforts collectifs pour lutter contre la demande et l’offre de produits illégalement commercialisés. Nous devons agir sur toute la chaîne du commerce illégal des espèces sauvages et nous devons impliquer les organismes qui, aux niveaux national et international, sont mandatés, formés et ont les ressources nécessaires pour lutter contre la criminalité transnationale.
Troisièmement, les espèces emblématiques tendent à être celles qui retiennent le plus l’attention, mais de graves menaces pèsent sur des espèces animales et végétales plus discrètes. Les anguilles d’Europe et les plantes médicinales en sont des exemples – une attention égale devrait être accordée à ces espèces. Le commerce illégal du bois est, par exemple, une question qui appelle nos efforts collectifs, et je vous encourage à en tenir compte et à tenir compte d’autres espèces lorsque vous préparerez, à l’avenir, des activités et des opérations. Le Secrétariat réunira une équipe spéciale sur le commerce illégal de spécimens d’espèces d’arbres inscrites à la CITES. Le but est d’élaborer des stratégies pour lutter contre le commerce illégal du bois puis de renforcer la coopération aux niveaux régional et international.
Récemment, la Banque mondiale a annoncé que le coût global du commerce illégal de produits de la pêche, des espèces sauvages et des forêts s’élève à environ 1000 à 2000 milliards de dollars des États‑Unis par an. Dans l’intérêt des générations futures et du monde dans lequel nous vivons, il est vital de mettre un terme aux agissements des criminels qui mettent en péril les moyens d’existence, la sécurité, l’économie et la pérennité de notre planète en exploitant illégalement les espèces de la faune et de la flore sauvages.
Excellences, Mesdames et Messieurs, je vous remercie de votre engagement et de votre dévouement dans la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages. Je n’ai aucun doute que ce travail se poursuivra et que vous êtes une source d’inspiration pour d’autres.
Je félicite une fois encore tous ceux qui y ont participé et en particulier nos partenaires de l’ICCWC, INTERPOL et l’OMD pour leurs efforts exceptionnels en vue de coordonner cette initiative hors du commun.
MERCI !