AU-DELA DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE :
Communautés, gouvernance, incitations et utilisation durable dans la lutte
contre la criminalité liée aux espèces sauvages
26 – 28 février 2015
Glenburn Lodge, Muldersdrift, Afrique du Sud
Allocution d’ouverture de M. John E. Scanlon, Secrétaire Général de la CITES
Prononcée par Tom De Meulenaer, Chef du Service scientifique de la CITES
Mme. Edna Molewa, Ministre de l’Eau et de l’Environnement d’Afrique du Sud
M. Braulio de Souza, Secrétaire exécutif de la Convention sur la diversité biologique,
Mesdames et Messieurs les représentants du Groupe de spécialistes de l’utilisation et des moyens de subsistance durables de l’UICN et de l’Institut International pour l’Environnement et le Développement,
Mesdames et messieurs les délégués, chers collègues et amis,
Je vous remercie de m’avoir invité à formuler quelques remarques en ouverture de ce colloque ‘Au-delà de la lutte contre la fraude : communautés, gouvernance, incitations et utilisation durable dans la lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages’. Je regrette de ne pouvoir être présent parmi vous aujourd’hui, mais la CITES est fort bien représentée en la personne de Tom De Meulenaer, chef du service scientifique, qui vous lit en mon nom cette brève allocution.
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La CITES a pour vision stratégique de ‘conserver la biodiversité et contribuer à son utilisation durable en garantissant qu’aucune espèce de la faune ou de la flore sauvage ne commence ou ne continue à faire l’objet d’une exploitation non durable du fait du commerce international, contribuant ainsi à une réduction substantielle du rythme de l’appauvrissement de la diversité biologique et à un apport significatif à la réalisation des Objectifs d’Aichi pour la biodiversité pertinents’.
Le caractère changeant et l’ampleur accrue du trafic illégal des espèces sauvages n’ont pas de secret pour vous. Aujourd’hui, ce n’est plus à un petit braconnage de subsistance que nous somme confrontés, mais bel et bien à un pillage industriel des espèces sauvages. Le commerce illégal de ces espèces revêt désormais la forme d’une criminalité transnationale, à l’instar d’autres activités néfastes telles que les trafics de stupéfiants, d’êtres humains, d’objets contrefaits ou de pétrole. Il est alimenté par une poussée de la demande, et souvent facilité par la corruption et la faiblesse des pouvoirs publics. Il existe des preuves solides de l’implication accrue de bandes de criminels organisés et de groupes armés non étatiques. Le commerce illégal des espèces sauvages sape l’état de droit et menace la sécurité des nations ; il dégrade les écosystèmes et constitue un obstacle majeur aux efforts des communautés rurales et des populations indigènes qui luttent pour gérer de façon durable leurs ressources naturelles.
Nous sommes face à une crise, et il convient de mettre en place immédiatement un dispositif de lutte contre la fraude faisant appel aux outils, méthodes et arsenal pénal employés pour combattre d’autres types de criminalité grave – tout en imposant des sanctions lourdes, largement couvertes par les médias à des fins de dissuasion. Il est préférable de concentrer les efforts sur les réseaux criminels internationaux et sur les gros bonnets qui dirigent ces activités illégales – et à cet égard, des efforts importants sont en cours dans l’ensemble des pays d’origine, de transit et de destination.
Toutefois, pour réussir à moyen et à long terme dans la lutte contre le trafic illégal des espèces sauvages, nous devons nous engager plus dynamiquement avec les communautés locales qui ont le plus à perdre du commerce illégal, et le plus à gagner en l’empêchant. Au-delà de la seule lutte contre la criminalité liée aux espèces sauvages, ces efforts portent également sur la bonne gestion des ressources naturelles et sur les avantages pour leur développement que les communautés locales peuvent retirer d’une utilisation durable des espèces sauvages assurant leur conservation, utilisation qui peut revêtir des formes diverses allant du tourisme axé sur la faune et la flore sauvage à l’utilisation des plantes et des animaux à des fins de consommation. .
Sur ce point, la CITES dispose de deux résolutions importantes adoptées par la Conférence des Parties : il s’agit de la résolution Conf. 8.3 (Rev CoP13), qui reconnaît les avantages du commerce de la faune et de la flore sauvages, et de la résolution Conf. 16.6, qui porte sur la CITES et les moyens de subsistance.
En outre, les décisions 16.17 à 16.25, relatives à la CITES et aux moyens de subsistance, ont été adoptées à la CdP de Bangkok en 2013. Elles énoncent la feuille de route pour traiter ces questions entre la CdP16 et la prochaine session à la fin 2016. En bref, ces décisions prévoient le développement d’outils permettant d’évaluer les impacts des inscriptions à la CITES sur les moyens de subsistance, l’élaboration de lignes directrices pour la prévention et l’atténuation des effets négatifs, et la réalisation d’études de cas réparties en étude spécifiques aux espèces et études thématiques. L’une des études thématiques prévues porte précisément sur ‘la criminalité liée aux espèces sauvages et les moyens de subsistance des communautés rurales’. Nous sommes convaincus que les conclusions de ce colloque constitueront un apport important dans ce domaine. Nous invitons ici les participants à approfondir cette étude de cas en collaboration avec la CITES afin de la présenter pour discussion et prise de décision à la CdP17.
A ce sujet, le Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), par le biais du Ministère du Développement durable (MDD) de Colombie, et le Secrétariat de la CITES ont organisé la semaine dernière un atelier sur “l’évaluation des impacts de la CITES sur les moyens de subsistance” à Cispatà, Colombie. Cet atelier visait à présenter des expériences réussies de maintien des moyens de subsistance, et à stimuler la diffusion des enseignements acquis sur les liens entre moyens de subsistance et espèces inscrites à la CITES.
Le projet de manuel sur les outils et les lignes directrices élaborés par le groupe de travail sur la CITES et les moyens de subsistance a également été débattu. Ce manuel a été élaboré conjointement par le Département du Développement durable de l’OAE et le Secrétariat de la CITES. Tous les Etats membres et organisations participant à l’atelier ont été invités à apporter leur contribution à la version définitive du manuel, et ont approuvé l’emploi de leur sigle. Un rapport complet de cet atelier sera disponible prochainement ; par ailleurs, nous avons récemment créé un portail accessible depuis notre site web, qui fournit des informations sur les moyens de subsistance et la CITES.
La Conférence de Londres sur le Commerce illégal des espèces sauvages, tenue en février 2014, a débouché sur une déclaration qui reconnait également les répercussions négatives du commerce illégal des espèces sauvages sur les moyens de subsistance, ainsi que la nécessité de renforcer les capacités des communautés locales de rechercher des opportunités durables de moyens de subsistance. Une conférence de suivi est prévue le mois prochain au Botswana pour évaluer les progrès. Le colloque qui se tient aujourd’hui à Muldersdrift, avec ses conclusions et ses recommandations, offre une grande occasion de donner un élan à ce processus, lequel peut, à son tour, contribuer à la réalisation des mandats internationaux adoptés par les Parties à la CITES.
Au cours du colloque, Tom explicitera plus en détails ces processus où la CITES est chef de file. Pour ma part, je souhaite vous encourager tous à saisir cette occasion pour apporter votre contribution à ces processus nés de la volonté des Parties, qui trouveront leur aboutissement, ici, en Afrique du Sud, fin septembre ou début octobre 2016, à la CdP17 de la CITES.
Je vous remercie vivement de votre attention et vous adresse tous mes vœux de succès pour le colloque.